
La proprioception : ce 6eme sens que l’on mobilise pour s’habiller
La 23eme semaine du cerveau vient d’avoir lieu, et elle nous offre l’occasion d’évoquer ce sixième sens souvent méconnu et pourtant constamment mobilisé dans notre vie quotidienne : la proprioception. Indispensable pour marcher, écrire, mais aussi pour enfiler une manche de pull, passer une jambe de pantalon ou boutonner une chemise, ce 6ème sens est aujourd’hui plus que jamais un objet d’exploration pour la science.
La vue passe par les yeux, l’ouïe par les oreilles, l’odorat par le nez, le toucher par la peau… mais la proprioception, elle, n’a pas d’organe sensitif dédié. Les récepteurs de la sensibilité proprioceptive se situent de façon plus diffuse dans le corps : ce sont des milliers de capteurs situés notamment au niveau de la peau, des muscles, des tendons, des os et des articulations qui renseignent en continu notre cerveau sur l’orientation de notre corps dans l’espace, sur nos mouvements et la position des différentes parties de notre corps les unes par rapport aux autres. Les signaux envoyés par ces capteurs passent par nos nerfs sensitifs pour aller vers la moelle épinière, le cervelet et le cerveau, qui réagit en contractant ou en relâchant certains muscles, généralement en mode « réflexe ».
Construit à partir du mot latin proprius (propre), le mot proprioception désigne littéralement la perception de soi, que le cerveau synchronise avec nos autres sens dans une interaction permanente. Ainsi, la proprioception intervient-elle de façon majeure dans l’élaboration du schéma corporel.
Autant dire que ce sens est plus que largement mobilisé dès qu’il s’agit de s’habiller, sans même que nous en ayons conscience : il contribue à projeter mentalement nos actions, nous permet de contrôler et coordonner nos mouvements, de situer de façon instinctive ou se trouve notre bras pour le passer dans l’emmanchure, mais aussi de nous tenir en équilibre pour passer un pantalon. C’est lui, aussi, qui nous conduit à agrafer notre soutien-gorge sans avoir besoin de regarder les agrafes, ou à passer nos chaussettes en continuant à lire le journal.
Ainsi, les troubles de la proprioception peuvent altérer considérablement l’autonomie, et notamment pour l’habillage. Ils peuvent générer des asymétries de tonus musculaires qui impactent la posture, des troubles de la localisation spatiale qui jouent notamment sur la notion d’équilibre, mais aussi des anomalies perceptives conduisant à des troubles cognitifs. On retrouve certains de ces symptômes entre autres chez des personnes atteintes du Syndrome d’Ehlers-Danlos, de TDA-h, chez celles atteintes de dyspraxies, et aussi chez des personnes âgées.
La proprioception est un sens qui s’entretient et se travaille, et l’habillage quotidien y contribue par les habiletés motrices, le sens de l’équilibre, les capacités de coordination des mouvement qu’il met à l’épreuve quotidiennement. Dans tous les sens du terme, s’habiller est aussi, assurément, une question d’équilibre.