
L’appel à la Fashion Revolution de Catherine Dauriac
Le mot d’ordre de la Fashion Revolution ? RESPECT. Respect de la planète, respect des travailleurs et travailleuses qui fabriquent nos vêtements depuis l’autre bout du monde… Et le respect des oubliés de la mode, dans tout ça ? Un entretien exclusif avec Catherine Dauriac, présidente de Fashion Revolution France.
Qui êtes-vous, Catherine Dauriac ?
Je suis rédactrice en chef adjointe aux impacts de la revue HUMMADE et présidente de Fashion Revolution France. Je travaille dans l’univers de la mode depuis 1987 et j’ai un parcours multi-casquettes. J’ai d’abord créé un bureau de presse qui accompagnait de jeunes créateurs émergents puis je suis devenue journaliste en 2003, avec un blog où je parlais de culture, de mode et d’environnement. J’ai ensuite commencé à écrire pour différents magazines de mode à partir de 2007. En parallèle, je suis experte textile grâce à ma collaboration avec la Confédération Européenne du Lin et du Chanvre depuis douze ans. Je dirais que mon parcours tourne autour de divers sujets : mode éthique, droits des travailleurs, belles matières, comment et pourquoi faire évoluer l’industrie de la mode…
La Fashion Revolution, c’est quoi ?
Fashion Revolution est un mouvement mondial parti d’Angleterre suite à l’effondrement du Rana Plaza le 24 avril 2013, qui a fait 1138 morts et plus de 2500 blessés. Des étiquettes de marques internationales qui faisaient fabriquer leurs vêtements par les propriétaires de l’usine de 7 étages ont été trouvées dans les décombres. Quand Carry Somers et Orsola de Castro ont apprit la nouvelle, elles ont lancé le #WhoMadeMyClothes sur les réseaux sociaux. Très vite, beaucoup de personnes l’ont utilisé en partageant des photos des étiquettes de leurs vêtements. L’année suivante, nous avons commémoré ce triste anniversaire avec un Fashion Revolution Day le 24 avril 2014. Dès l’année suivante, l’événement s’est transformé en Fashion Revolution Week menée dans 99 pays, dont la France, et partagée un peu partout dans le monde.
Et alors, la Fashion Revolution Week 2021 ?
Le thème de cette année est « Droits, relations et révolution ». On aborde donc différents axes, comme La Défense des droits des travailleurs, notamment le devoir de vigilance des entreprises actuellement en discussion à la Commission Européenne. Mais aussi l’interconnexion du vivant, de l’homme et de la nature, avec des sujets sur l’eau, les matières toxiques, la déforestation… et la révolution qui est nécessaire pour faire changer l’industrie de la mode !
Nous remercions d’ailleurs chaleureusement La Confédération Européenne du Lin et du Chanvre, notre partenaire officiel, pour son engagement à nos côtés. Plus de 300 photos ont été reçues de toute la filière du lin européen (des agriculteurs aux tisseurs – tricoteurs, en passant par des marques qui utilisent le lin dans leur collection). Vous pouvez d’ailleurs découvrir leur Manifeste très poétique en vidéo.
Cette édition 2021, qui a nécessité 3 mois de préparatifs, a réuni une quinzaine d’événements : conférences, webinaires, concours d’upcycling en partenariat avec l’IFA et ISLA COLLECTIVE , défilé en collaboration avec l’association Youth For Climate…
Tous les webinaires de cette édition 2021 sont d’ailleurs en libre accès sur la page Facebook de Fashion Revolution France.
Vous aviez l’habitude d’organiser des événements en physique… avez-vous eu des difficultés à passer au tout digital à cause de la pandémie ?
C’est vrai que nous avions l’habitude d’organiser des ateliers de réparation de vêtements, des défilés de mode éthique, des prises de parole… Mais nous avons su nous adapter. Nous avions dû revoir tout notre programme au dernier moment l’année dernière, puisque nous avions été confinés juste avant la Fashion Revolution Week 2020. La totalité de notre programme avait été proposée sous forme d’Instagram Lives. Cette année nous avons imaginé des webinaires sur Zoom, des lives sur Facebook et Instagram, un concours d’upcycling, un défilé de vêtements upcyclés, la diffusion d’un documentaire… Nous souhaitions varier les contenus.
Interviewée le mercredi 21 avril, Catherine Dauriac nous confiait que les trois premiers jours de cette édition digitale étaient un véritable succès : plus de 3000 abonnés du Instagram, de nombreux partages sur les réseaux sociaux et même l’appui du Palais Galliera, célèbre musée de mode…

Tous droits réservés : Fashion Revolution France.
Et la mode eco-friendly en 2021, c’est quoi ?
La mode durable ou eco-friendly, c’est une multitude de solutions et de pratiques très différentes. On peut constater une vraie prise de conscience du grand public depuis l’an dernier. Que ce soit sur les problèmes de toxicité des vêtements, des droits des travailleurs et travailleuses. Par exemple avec la campagne #PayUpFashion pour aider des travailleuses qui n’ont pas été payées en Asie, soutenue par le collectif Éthique sur l’Étiquette et Clean Clothes Campaign.
À côté de cela, beaucoup de jeunes marques aux ambitions et valeurs engagées contre le gaspillage des matières et des vêtements sont nées ces derniers mois. Des boutiques de vintageet seconde main se sont aussi ouvertes… La mode éthique, c’est un sujet très vaste. Il y a des personnes qui se tournent vers le commerce équitable, d’autres vers les matières écologiques comme le lin ou les textiles recyclés… On a beaucoup de possibilités pour consommer une mode plus respectueuse de l’humain et de la planète.
Y-a-t-il d’autres mouvements que vous nous recommandez de suivre ?
La première chose à faire, c’est de suivre ce qu’il se passe sur les réseaux sociaux. Via les hashtags par exemple : #upcycling, #visiblemending, #madeinfrance (bien qu’il faille parfois se méfier du made in France). Vous y trouverez de nombreuses sources d’informations et d’inspirations.
Il y a également des mouvements très importants à suivre en France. Par exemple l’UAMEP ou les Fashion Green Days, partis de Roubaix et implantés dans toute la France, deux associations qui œuvrent en collectif pour faire avancer les choses.
Avez-vous des astuces à partager à nos lecteurs et lectrices pour qu’ils s’assurent de consommer une mode plus juste ?
Le vêtement le plus écologique est celui que vous avez déjà dans votre placard. La première chose à faire est donc de le trier, en faisant plusieurs tas. Ce que vous gardez, ce que vous allez réparer, ce que vous allez donner et pour les pièces trop abimées, ce que vous allez recycler. L’essentiel est de ne jamais jeter puisque la matière est toujours utilisable d’une manière ou d’une autre.
Ensuite, il faut être créatif avec ce que l’on a déjà. Et ce qu’il vous manque, essayer de l’acheter en seconde main… Et lorsque ce n’est pas possible, cherchez des marques éthiques qui utilisent de belles matières. Les matières ont un impact sur votre santé, il est important de bien les choisir. Il ne faut pas non plus qu’elles soient toxiques pour l’environnement comme les polyesters et polaires qui dégagent des microfibres dans l’eau quand on les lave. Privilégiez des matières naturelles comme le coton bio (sans pesticides ni OGM), le lin, la laine (non issue d’élevages intensifs)…
Pensez également à regarder par qui et comment sont fabriqués les vêtements. Par exemple sur les sites internet des marques, et lorsque l’information n’est pas disponible, n’hésitez pas à les interroger. Vous pouvez également utiliser nos #WhoMadeMyClothes et #WhatsInMyFabric pour exiger de la traçabilité et transparence aux marques.
On entend de plus en plus parler de green washing… Comment le déceler et éviter d’enrichir des marques qui le pratiquent ?
Le mieux, c’est de consulter les sites internet des marques pour voir ce qu’elles y déclarent de leur chaîne de valeurs. Où sont fait les vêtements, d’où viennent les matières, sont-elles bien référencées, quelles sont leurs politiques sociales et RSE… et de leur poser les questions directement. Vous pourrez ensuite vous faire votre propre idée en fonction de ce que vous aurez trouvé. Mais il est important de faire attention, car de nombreuses marques pratiquent le green washing, de très grandes comme de plus petites.
« Révolution et résistance ! »
Il paraît que la mode respectueuse de la planète est plus onéreuse… Est-ce vrai ?
Je ne pense pas. Si vous achetez un beau vêtement réalisé dans de belles matières, vous le porterez plus longtemps car vous en prendrez soin, la matière restera agréable… Et vous aurez tout simplement envie de le porter. Vous le réparerez même lorsque nécessaire, et son empreinte carbone diminuera petit à petit. Prenez l’exemple d’un t-shirt en coton. Si vous l’achetez chez une grande enseigne, il n’aura plus de forme après seulement quelques lavages. À l’inverse, si vous le payez un peu plus cher pour qu’il soit de meilleure qualité, vous le garderez plus longtemps. Et puis il y a aussi la seconde main qui se multiplie et qui permet une chute des prix. Vous pouvez trouver un beau pantalon, réalisé dans une belle matière et conçu avec amour pour le quart de son prix dans le luxe. La clé, c’est d’être malin, de savoir ce que l’on veut et de s’y tenir.
La Fashion Revolution milite pour le respect de la nature et des droits des travailleurs. Quel est l’impact de la mode aujourd’hui ?
L’impact social, écologique et humain de la mode est bien trop important. C’est un coût qu’on ne peut plus accepter au 21èmesiècle. Prenez le cas du travail forcé des Ouïghours, victimes d’un génocide… Savez-vous combien d’esclaves travaillent pour vous aujourd’hui ? Personnellement, je consomme très peu en termes de mode et d’alimentation, pourtant 19 esclaves travailleraient pour moi. On ne peut plus se permettre de se voiler la face… Il y aurait au bas mot 46 millions d’esclaves dans le monde selon la fondation Free Walk… C’est insupportable.
Nous vous invitons à vous aussi faire le test : pour connaître votre rôle dans l’esclavage moderne et repenser votre façon de consommer, rendez-vous sur slaveryfootprint.org et répondez aux questions en toute honnêteté.
À propos de la dimension sociale de la mode, on y entend encore aujourd’hui peu parler de handicap… Qu’en pensez-vous ?
C’est un problème. Chez HUMMADE, nous travaillons à une mode inclusive qui permette à tous de s’habiller facilement et selon ses goûts. C’est un sujet important ! La mode n’est pas que paillettes et falbalas. La mode, c’est la façon dont on se présente au monde. On doit donc tous être égaux sur ce plan et ce quelque soit notre âge, que l’on soit en situation de handicap ou non. Se vêtir est un droit fondamental de l’être humain, au même titre que manger et boire. La mode se doit d’être plus inclusive.
Quel est le positionnement de Fashion Revolution par rapport au handicap ?
Nous aurons bientôt un mois d’actions dédiées à l’inclusivité… et le handicap sera un des sujets abordés. Par ailleurs, la troisième édition de la revue HUMMADE qui est consacrée au corps contiendra une interview de Muriel Robine, la fondatrice de Bien à Porter.
L’industrie de la mode a longtemps été considérée comme source d’injustices (distinctions en fonction des classes sociales, des morphologies, des couleurs de peau…). Comment Fashion Revolution agit concrètement pour la rendre plus juste ?
Notre première mission, c’est l’information. L’éducation des citoyens et citoyennes. Nous réalisons d’ores et déjà des partenariats avec des étudiants, nous espérons prochainement mener des actions auprès des collèges et lycées. Fashion Revolution est un mouvement citoyen, notre rôle est d’informer les gens qui nous suivent et de les éduquer. L’antenne britannique de Fashion Revolution a un programme éducatif en anglais que l’on peut suivre gratuitement… Je pense qu’un outil similaire accessible en français serait intéressant.
Nous donnons également la parole à des personnes qui ont une expertise d’un certain sujet : mode et environnement, mode et inclusivité, mode et santé… Tous les sujets inhérents à la révolution de la mode. Nous sommes là pour inspirer, guider et faire bouger les choses. Révolution et résistance !
Comment pouvons-nous soutenir la Fashion Revolution ?
Faîtes attention à ne pas vous faire berner par le marketing et la compulsion d’achats. Réfléchissez à deux fois avant d’acheter un vêtement, faîtes le tri de vos placards… vous y trouverez des merveilles… C’est un bon début.
Vous pouvez aussi soutenir d’autres mouvements comme l’UAMEP et les Fashion Green Days, acheter la revue HUMMADE…
Nous vous invitons à suivre Fashion Revolution sur Facebook et Instagram.
Professionnel de l’habillement ? De nombreuses ressources sont à votre disposition pour vous aider à contribuer à une mode plus éthique et verte. Vous pouvez par exemple consulter l’outil Fashion Future 2030 ou utiliser l’application My EP&L qui mesure en temps réel le coût environnemental d’une pièce d’habillement et les économies réalisables en utilisant d’autres matières.
nous souhaitons signer la pétition pour un salaire décent des travailleurs de la mode aux Seychelles pouvez-vous nous adresser sur mon e mail l’adresse électronique pour me permettre de la signer, je n’ai pu la trouver sur les sites Seychelles Revolutions et Max Havlaar. Merci de votre aide.
Bien à vous.
Dr. Giromini
merci de votre aide :
nous souhaitons signer la pétition pour un salaire décent des travailleurs de la mode aux Seychelles pouvez-vous nous adresser sur mon e mail l’adresse électronique pour me permettre de la signer, je n’ai pu la trouver sur les sites Seychelles Revolutions et Max Havlaar. Merci de votre aide. Bien à vous. Dr. Giromini