Chronique ciné de Circé : Love, et autres drogues
Love, et autres drogues (2010) est une comédie romantique plutôt classique de Edward Zwick, si ce n’est qu’elle aborde le thème de la maladie à travers le prisme de l’amour et du couple. Ou peut-être est-ce le contraire ?
Jamie (Jake Gyllenhaal) est un jeune représentant médical ; Maggie (Anne Hataway) est une artiste atteinte de la maladie de Parkinson. On commence par suivre Jamie qui apprend son métier de commercial et devient redoutable pour vendre les différents médicaments dont il a la charge.
Puis, il rencontre Maggie lors d’une consultation médicale lors de laquelle il se fait passer pour un interne – ce qui lui vaudra des coups de dossier sur la tête quand elle s’en rendra compte. Elle lui plaît, pourtant, et il décide de la recontacter. Une relation, purement sexuelle dans un premier temps, se développe alors entre eux. Au fil du temps, des sentiments naissent mais Maggie les refusent : malade, elle ne veut pas d’une histoire avec engagement. S’ensuit alors toute une série de séparations et de réconciliations sur fond de cœur blessé et de maladie…
La maladie, troisième personnage principal
Avec son humour potache, ses scènes de sexe et ses termes un peu crus, Love, et autres drogues a un petit côté Very bad trip. Mais au milieu de cette atmosphère de légèreté est évoqué un sujet nettement plus sérieux : la maladie, et plus précisément l’amour quand on a une maladie chronique.
Lors de la première scène où apparaît, comme nouveau personnage, la maladie de Parkinson, Maggie est chez le médecin et parle de la manière dont elle a été diagnostiquée. Elle énumère toutes les hypothèses qui lui ont été données, sur un ton qui se veut dégagé, très bien illustré par cette phrase : « j’ai été soulagée que ce ne soit pas celle-là [la syphillis], je ne me voyais pas dans le rôle de la roulure du 19e siècle ».
La maladie se fait progressivement de plus en plus présente. La main de Maggie se met à trembler, son disagnostic est explicité, puis il y a cette phrase lourde de sens, à l’attention de Jamie : « Moi non plus je ne voudrais pas d’une malade ».
La fuite
Maggie a des attitudes provocatrices crues qui ne plairont certes pas à tout le monde. Jamie ne vaut pas mieux, puisque son rôle est celui du séducteur chevronné qui ne pense qu’à « baiser », pour reprendre les mots de son propre frère. Les sentiments et le comportement de Jamie évoluent pourtant au fil des images : il se met à faire attention à Maggie, à organiser des petits repas, à la défendre quand son ex la traite de malade – comme si elle n’était que ça, malade.
De l’autre, Maggie part en courant. Les scènes qui parlent de la maladie ne sont pas si nombreuses. Elles s’égrènent au milieu des blagues potaches. Peut-être est-ce le décalage de ton qui les rend d’autant plus fortes, ou peut-être sont-elles simplement justes et touchantes. Maggie dit simplement ce que chaque personne malade peut se dire à un moment ou un autre : qu’elle aura plus besoin de lui qu’il n’aura besoin d’elle, que personne ne veut d’une fille malade, qu’elle ne sait pas dans quel état elle sera le lendemain.
A un moment, Jamie décide de tout faire pour trouver les meilleurs spécialistes, et emmène même Maggie faire le tour des USA. Mais elle, ne le vit pas bien. Elle ne se sent plus que malade et pourtant ce qu’elle veut, c’est vivre avec sa maladie, pas être elle. Elle refuse aussi que l’amour de Jamie soit inséparable d’une hypothétique guérison.
Exagération ou réalité trop dure en entendre ?
A un moment, Maggie accompagne Jamie à un colloque médical. Suite à une rencontre, elle se retrouve à une autre sorte de colloque, juste en face, réunissant des personnes atteintes de la maladie de Parkinson ainsi que leurs proches. Là, elle se sent revivre, elle entend des témoignages, elle voit des gens vivre et être heureux. Jamie la rejoint et, autour du buffet, il rencontre le mari d’une personne malade à qui il demande conseil et qui lui répond : « partez ». Il lui décrit comment elle va devenir, qu’il va finir par devoir lui donner à manger, « nettoyer sa merde ».
Bien sûr, c’est un discours que l’on peut trouver extrémiste mais il vient d’un personnage qui souffre de ce que la maladie a fait à la personne qu’il aime, à son couple. On peut penser que c’est exagéré, qu’aucune maladie n’est écrite d’avance, que la médecine fait beaucoup de progrès. Mais il n’empêche que ce sont des réflexions que toute personne malade se fait parfois dans le secret de son esprit.
On peut dire que Love, et autres drogues c’est un film à l’eau de rose, que c’est un film potache, on peut être d’accord ou non avec la vision du couple et de la maladie qui nous est montrée. Quoiqu’il en soit, on ne peut que souligner cette approche nouvelle qui parle d’un sujet souvent passé sous silence qu’est l’amour avec une maladie. Et la phrase que l’on peut retenir – et qui remet les personnes malades à leur place d’être humain avant tout – pourrait être cette simple réplique de Jamie : « T’as besoin qu’on prenne soin de toi, tout le monde en a besoin ».